Ruthénium (Ru)

Aéronautique et spatial Electronique Médical Piles à combustible et technologies hydrogène Robotique
Famille(s) : Platinoïdes
Le ruthénium est un métal brillant, dur et gris argenté, qui fait partie du groupe du platine avec cinq autres substances (platine, palladium, rhodium, iridium et osmium). Il possède un point de fusion très élevé et est inerte vis-à-vis de la plupart des autres produits chimiques. Comme la plupart des platinoïdes, il est doté d’excellentes propriétés catalytiques, ce qui en fait un métal très demandé pour la synthèse organique et la désulfuration dans l’industrie du pétrole. Il rentre également dans la composition des disques durs pour en accroitre l’efficacité de stockage, et les circuits intégrés. Le ruthénium, dont le marché est très modeste (environ 30 tonnes par an) est produit très largement en Afrique du Sud, en sous-produit des mines de platine, et au Zimbabwe.
Matrice de criticité
Forte criticité

Usages et consommation

Répartition des usages mondiaux du ruthénium en 2022

Consommation brute 2022
33.6 t
Source de données : Johnson Matthey, 2024

 

Principaux usages du ruthénium dans le monde en 2022

  • Industrie électrique et   électronique   (36.1%)   :   disques durs, contacteurs, puces résistives, thermostats, panneaux solaires etc.
  • Industrie chimique (37.4%) : raffinage dans l’industrie pétrolière, catalyse pour la synthèse d’ammonium ou encore d’acide acétique, désinfectants etc.
  • Electrochimie (12.8%) : production de chlore et de soude par électrolyse, piles à combustible etc.
  • Autres (13.7%) : alliages et superalliages dans l’aéronautique, renforcement anti-corrosion du titane, couronnes dentaires etc.

 

Perspectives d’évolution de la consommation globale : positives à moyen terme

  • Forte croissance de l’usage des disques durs et des puces résistives, entrainant un maintien de la consommation de ruthénium sur le court terme tant que l’avantage coût de la technologie HDD persiste. A plus long terme, le passage de la technologie HDD à la technologie SSD (ne contenant pas de Ru) pourrait cependant entrainer une baisse de la consommation de ruthénium.
  • Le ruthénium permet d’obtenir des superalliages de meilleure qualité avec des propriétés plus intéressantes pour des applications dans l’aéronautique. Avant le Covid-19, l’utilisation des superalliages affichait une perspective de croissance de 7% jusqu’en 2027 mais l’épidémie est susceptible de fortement freiner son déploiement. On attend une reprise du secteur aérien pour 2025.
  • Fort d’une très bonne capacité catalytique, le ruthénium est grandement utilisé dans l’industrie chimique où son usage devrait grandir au fil des ans.

Production mondiale

La substance est-elle est un sous-produit ? Oui

  • En totalité en sous-produit minoritaire d’autres platinoïdes, notamment du platine

 

Principaux pays producteurs miniers de ruthénium en 2021

  • Afrique du Sud, Zimbabwe, Russie, Etats-Unis, Chine
  • La production de ruthénium n’est que rarement reportée par les producteurs miniers, notamment en Amérique du Nord, en Russie ou en Chine. Il est très difficile d’obtenir des données précises sur la production de ce métal
  • Concentration très élevée : non disponible

 

Production métallurgique mondiale de ruthénium métal 2018

  • La production métallurgique primaire est à peu près équivalente à la production minière (les producteurs miniers déclarent souvent les platinoïdes produits métallurgiquement ou les platinoïdes payables, donc récupérables).
  • Production primaire estimée en 2019 : environ 40 t Ru
  • Production secondaire : 20 t environ (recyclage estimé à 50% de la production primaire)
  • Répartition : les principaux producteurs sont les sociétés Anglo American Platinum (Afrique du Sud), Sibanye-Stillwater (Afrique du Sud), Impala Platinum (Afrique du Sud), Northam Platinum (Afrique du Sud), Norilsk Nickel-Nornickel (Russie) etc.

Production minière de ruthénium en 2021

Production totale 2021
33 212 kg
Source de données : BRGM 2023, ICG 2023

Ressources et réserves

Estimation des réserves de platinoïdes en 2023

Total mondial
71 kt de platinoïdes
Source de données : USGS, 2020

 

Réserves connues et évolution

  • 69 kt de platinoïdes (>200 ans de la production de 2019) selon l’USGS
  • Il y a pas d’évaluations exhaustives et vérifiables des réserves minières en ruthénium directement. On peut en revanche grossièrement estimer à 5,5 kt de Ru les réserves mondiales (<150 ans de la production de 2018).

 

Répartition géographique des réserves

  • En plus de posséder la quasi-totalité des réserves mondiales en platinoïdes (91%), l’Afrique du Sud détient des teneurs très intéressantes en ruthénium puisqu’il représente en moyenne 2,2% des platinoïdes produits (moyenne des niveaux minéralisés UG2, Merensky et Platreef). L’Afrique du Sud possède donc 98% des réserves mondiales de ruthénium, soit 5 540 t, loin devant le Zimbabwe (60 t) et la Russie (43 t).
  • Concentration extrêmement élevée des réserves en platinoïdes (IHH = 0,83) et encore plus en ruthénium (IHH = 0,96)

 

Perspectives d’évolution de la production

  • L’Afrique du Sud reste de très loin le producteur majeur de ruthénium dans le monde. Cependant il s’agit d’un pays à risque dont la santé économique repose en grande partie sur son industrie minière, qui est notamment dépendante de l’électricité produite et distribuée par Eskom, qui souffre de grosses coupures pouvant obliger certains acteurs à stopper la production momentanément.
  • Le ruthénium est obtenu comme sous-produit du platine. Avec les prix actuels du platine, aucune mine n’est rentable économiquement. Toutes travaillent à perte. Avec l’industrie du platine sur le déclin, la production de ruthénium est donc inévitablement en danger.
  • Les projets futurs concernant l’extraction des platinoïdes souhaitent délaisser les niveaux de l’UG2 et du Merensky, au profit du Platreef, où l’extraction des platinoïdes est plus rentable grâce à une exploitation à ciel ouvert et donc un coût d’exploitation plus faible. Or, le Platreef a une teneur moindre en ruthénium que les deux autres niveaux, ce qui devrait impacter à la baisse la production.

Substituabilité

D’une manière générale, les platinoïdes sont partiellement substituables entre eux. Cette substitution s’accompagne toutefois d’une perte d’efficacité ou de coûts plus élevés.

Substitutions de substances :

  • Electrodes : mercure, iridium, platine
  • Superalliages : iridium, molybdène, niobium, tungstène, rhénium
  • Applications nécessitant une résistance à la corrosion : verre, molybdène, nickel, platine, titane, acier inoxydable et zirconium
  • Prothèses : titane, céramique, chrome, cobalt

Recyclage

Taux de recyclage

  • Compte tenu de leurs prix élevés, les platinoïdes sont relativement bien récupérés et recyclés
  • Le ruthénium est toutefois plus difficile à recycler mais des méthodes innovantes sont actuellement testées dans ce but. Les producteurs japonais sont en particulier à l’origine de ces avancées.
  • Plus de 50% du ruthénium utilisé est recyclé, notamment lors des utilisations en tant qu’agent catalytique.
  • Recyclage en croissance depuis la fin des années 1980.

Prix

Établissements des prix

  • Pas de cotation publique sur les marchés boursiers. Prix établis par négociations directes de contrats entre producteurs et transformateurs ou utilisateurs. Fourchettes de prix publiées quotidiennement par Argus Media, à partir des prix publiés par Johnson Matthey.

 

Variations des prix

  • Prix moyen 2020 (janvier-août 2020) : 251 US$/oz
  • Évolution du prix sur 1 an: - 7,9%
  • Évolution du prix depuis 2004: + 503,1%
  • Ordre de grandeur de la valeur du marché du Ru métal (8 828 000 US$/t, prix moyen 2019 × 36,5 t, production métallurgique en 2019) : 322 M US$

Restrictions au commerce extérieur, réglementations

Restrictions au commerce international

  • Pas de restrictions au commerce international
  • Les pays producteurs majeurs, Afrique du Sud et Russie, sont classés à risque moyen à médiocre dans les classifications des risques pays (Coface, OCDE, Fraser Institute)

 

Réglementation REACH

  • Le ruthénium sous forme métal ne présente à priori pas de danger pour la santé mais certains de ses composés sont enregistrés dans REACH et présentent certains dangers (combustible, brûlure, toxicité pour la vie aquatique etc.). Néanmoins, la plupart des composés contenant du ruthénium sont classés comme dangereux pour d’autres substances contenues, comme le chlore (ex : chlorure de ruthénium hydraté)
  • Par ailleurs, les boues issues du raffinage électrolytique du cuivre ou du nickel, qui sont retraitées pour en extraire les sous-produits mineurs (Se, Te, métaux précieux dont Ru) sont listées dans les appendices 5 et 6 de l’Annexe XVII et sont considérées comme très dangereuses pour l’Homme et l’environnement

Production française primaire et secondaire - ressources

Production minière française

  • Production non publiée, uniquement issue du recyclage.

 

Production métallurgique primaire française

  • Pas de producteur français de ruthénium raffiné

 

Recyclage en France

  • Il n’y a que très peu de données disponibles sur le recyclage du Ru. Néanmoins, les alliages Ru-(Pt/Pd) contenus dans les cartes électroniques et les disques durs peuvent être récupérés.
  • Le gisement annuel collectable en France peut être estimé à 0,3 t pour un gisement annuel collecté estimé à seulement 0,03 t

Commerce extérieur, consommation française

  • Les nomenclatures douanières regroupent 3 platinoïdes (ruthénium, iridium et osmium) mais la proportion de ruthénium concernée est inconnue et la quantité de ruthénium échangée ne peut donc pas être calculée (de même pour l’iridium et l’osmium), même si au vu de la taille de leur marché respectif, il est probable que Ru>Ir>Os.

 

Consommation française apparente en 2019 (production + importations – exportations)

  • Consommation apparente de 4,5 t de Ru, prenant en compte le ruthénium sous forme de minerais, de poudre ou de produits mi-ouvrés.
  • Chiffre peu significatif puisque pour les références, le ruthénium est mélangé avec d’autres métaux comme l’iridium et l’osmium.
  • En gardant ce chiffre pour l’iridium et le ruthénium (la part d’osmium est marginale), et en sachant que le ruthénium représente un marché mondial 4,5 fois plus grand que celui de l’Ir (consommation mondiale en 2019 de ruthénium : 36,5 t contre 8,2 t pour Ir), on peut alors estimer la consommation française apparente en Ru à 3,7 t environ.

Evaluation de la criticité

Très fort Fort Moyen Faible Très faible Très faible Faible Moyen Fort Très fort Importance stratégique pour l'industrie française Risques sur les approvisionnements